Knot

Traduction : noeud

Une petite rue, peu passante, comme endormie. Il n’y a que peu de commerce dans cette paisible rue, un philatéliste, une librairie de livre ancien et un magasin de pipe et nœud de papillon. Et puis légèrement en retrait, on trouve une boutique d’antiquité un peu poussiéreuse, un peu oublié. Son nom flotte en grandes lettres dorées peintes sur la baie-vitrée qui sert de devanture : le cor de brume.

On pourrait presque croire la boutique abandonnée au vu du peu de clients qui y entrent. C’est d’ailleurs comme si tout était fait pour que les badauds qui par hasard se retrouveraient face au magasin n’aient pas envie d’y entrer.

La lourde porte de bois grince lors qu’on la pousse, refusant autant que possible de s’ouvrir, comme accrochée au sol. L’intérieur est plongé dans la pénombre, une petite ampoule pendant au bout de son fil essayant tant bien que mal de repousser les ténèbres.

Quand au propriétaire, il ne prendra bien souvent même pas la peine de lever le nez de son bureau trop occupé à examiner un objet ancien, à lire d’épais volumes ou à noircir des pages de livres de comptes.

Et pourtant, en cette fin d’après-midi froide d’hiver, la lourde porte s’ouvre et la petite clochette accrocher au chambranle tinte doucement.

« Désolé, mais il est tard, j’allais fermer, pourriez vous revenir demain » lance le vieil homme assis à son bureau, sans même lever les yeux. « Cela ne va pas être possible papy » répond méchamment le plus grand des deux hommes qui vient d’entrer tout en tirant le verrou. « Mais que faites-vous ! Sortez de mon magasin où j’appelle la police, mon fils est inspecteur ! » « Pierrot tu veux bien fermer les rideaux, j’ai à parler avec le vieux » se contente de répondre le grand inconnu.

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Les coups pleuvent, choc mou de poings contre la chair. Un coup, un hurlement, un coup, un hurlement. Chant en canon de la torture. « Alors papy, tu vas nous dire où il est le Capucin de plomb ? C’est que Pierrot va finir par se faire mal aux mains à force de taper » interroge l’homme en faisant signe à son comparse de stopper la pluie de coups. « je … je .. ne sais .. pas .. » essaie d’articuler le malheureux tenancier de la boutique, le visage tuméfié, les lèvres éclatées tout en crachant du sang. « Tu veux vraiment énerver Pierrot papy… » reprend l’homme. « Alors je vais te rafraîchir un peu la mémoire » poursuit-il. « Imagine une corde, une corde fait en cheveux humain. Imagine maintenant qu’avec cette corde, on fasse un gros nœud de capucins. Un nœud gros comme une belle calebasse. Imagine toujours Papy, qu’ensuite on trempe ce nœud dans le plomb. Tu imagine ? Est-ce que tu crois que tu pourrais oublier un tel objet après l’avoir croisé ? » demande le tortionnaire. « Je .. sais .. pas » « Je vois… alors Pierrot va devoir continuer à te rafraîchir la mémoire, tu va vraiment nous faire perdre toute la soirée papy. »

Et la musique des coups reprend. « Il s’est encore évanoui patron » « Jette-lui donc de nouveau un seau d’eau Pierrot, il faut qu’il parle » « ça ne marche pas patron, il a eu son compte » « Bon, il est plus coriace que ce que je pensais, on reviendra »

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Plusieurs heures passent, la nuit est là, la boutique est un champ de ruine, au sol le vieil homme gémit de douleur, rampant lentement jusqu’à son bureau.

Petit à petit, en gémissant de douleur, il tire sur le fil du téléphone, faisant finalement tomber celui-ci au sol.

Lentement, tour de cadran après tour de cadran, en pleurant de douleur, le vieil homme compose un numéro.

La tonalité enfin.

« Bonjour, pouvez-vous me mettre en communication avec mon fils ? » « Non oui je vais bien, mais je suis tombé dans mon magasin, je crois que je me suis cassé quelque choses » « Oui, mon fils, l’inspecteur de police Augustus Spinor »

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