Suit

Traduction : costume / combinaison

« Spinor, dans mon bureau, tout de suite ! » s’époumona le Capitaine en ouvrant la porte de celui-ci. « Ne me faites pas attendre où je vous vire » rajouta le gradé pour faire bonne mesure avant de refermer violemment la porte.

Le lourd silence qui avait recouvert la salle ouverte des enquêteurs se dissipa peu à peu pendant qu’un jeune homme rassemblait quelques papiers épars, le dénommé Spinor a n’en pas douter, et se dirigeait, avec l’entrain d’un condamné allant à la potence, vers le bureau de son supérieur.

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« Alors Spinor, vous avez du nouveau ? Une piste, des indices ? Les journalistes lui ont donné un nom vous savez, l’équarrisseur !! » lance le capitaine tout en jetant un journal vers Spinor lorsque celui-ci entre dans le bureau.

Le pauvre Spinor en essayant de rattraper le projectile de papier au vol, laisse échapper ses dossiers qui rependent leur contenu au sol. Photos de scènes de crime, de cadavre humain en noir et blanc, compte rendu d’autopsie, plan, notes, tout s’éparpille.

« Il y a six cadavres à morgue, six cadavres auxquels il manque leur peau, toute leur peau et leur yeux !! Ce malade leur a même arraché les yeux »

Les décibels de la première phrase aurait gentiment réveillé les morts si le commissariat s’était trouvé un peu plus prêt du cimetière de la ville. Pourtant chaque phrase suivante était hurlé un peu plus que la précédente. Le téléphone en bakélite posé sur le bureau en tremblait.

« Et vous ? Vous faites quoi Spinor ? A part mettre le bordel dans mon bureau avec vos papiers inutiles ? Rien RIEN »

Les vitres du bureau tremblaient sous la puissance de la voix du capitaine. Un Concorde au décollage aurait été plus reposant pour les oreilles du pauvre Spinor. Quant à l’ouvrier occupé à réparer la chaufferie au sous-sol, il était maintenant au courant de toute l’affaire.

« Monsieur, nous avançons, nous avons des pistes, nous essayons de trouver des liens entre les victimes, mais entre la mamie du parc, le photographe, la jeune femme, .. nous ... »

« Vous ne faites rien, vous êtes des bons à rien. Je ferrais mieux d’engager les journalistes de ces foutus torchons pour venir faire votre travail. Vous devriez lire l’article du jour. En plus de lui trouver un nom, ils ont découvert que le même type de meurtre se répétait, régulièrement, tout les 50 ans !!! »

« Nous le savions déjà cela Monsieur, je vous l’avais indiqué dans mon précédent mémo, il semblerait effectivement que nous ayons à faire à une lignée d’imitateurs, peut-être un groupe sataniste ou autre, nous ne savons pas encore .. »

« Ce que je sais, c’est que ce commissariat est rempli d’idiots et que c’est le cas depuis à priori trois cents ans, si je dois en croire ce torche-cul, vu que cela fait trois cents ans que vous et vos prédécesseurs n’arrivaient pas à le mettre sous les verrous !!!! Faites votre travail bon sang Spinor, sinon, vous n’en aurez bientôt plus !!

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Un grand couloir glacé, blanc, noir, parfois bleu. Iel se déplace lentement, sans vraie forme, parfois grand, parfois petite, une silhouette mouvante, changeante, mais toujours grise.

Les couloirs encore, parfois Iel croise ses serviteurs, qui se courbent alors aussi vite qu’ils le peuvent, sans iel regarder, surtout sans parler, ils n’ont pas le droit de parler lorsqu’iel pourrait les entendre.

Iel parcourt son palais. Iel a envie de sortir, de se mêler aux vivants qu’iel sent vivre au dessus. Iel se hâte maintenant. Comment s’habiller, quelle forme choisir.

A une intersection, iel hésite. Puis finalement continue sur sa lancée. La porte de ses appartements. Sa chambre, où iel entrepose ses trésors les plus précieux. Tout en se dirigeant vers la porte de son dressing, iel jette un regard à ceux-ci. L’Athamé de celle dont iel ne prononce plus le nom, une tsantzas pendu par les cheveux, tellement d’objet de pouvoir. Et au centre, un gros cristal légèrement rosé.

Iel a envie d’y jeter un regard, mais non, il est l’heure de sortir se mêler au monde, sortir trouver un nouveau costume pour remplacer les anciens.

Iel ouvre la porte du dressing. Un froid d’enfer l’accueille. Iel s’enfonce dans la pièce, nullement indisposé par la température. Des corps, ou plutôt des peaux sont délicatement accrochées à des cintres. En dessous de chaque peau, dans une petite coupe remplie d’un liquide jaunâtre flotte deux yeux.

Iel s’enfonce dans les rayons et finit par trouver ce qu’iel cherche. Ce soir, iel sera donc un dandy.

Iel sourit, les humains ont coutume de dire que l’habit ne fait pas le moine …

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